ITPC-MENA: La veille et le plaidoyer au cœur de la riposte de la société civile

Q&A avec Aissam Hajji, chargé de plaidoyer de la coalition internationale de préparation au traitement au Moyen-Orient et en Afrique du Nord (ITPC-MENA)

La loi du marché et la mondialisation impactent directement l’abordabilité et la disponibilité des médicaments. ITPC-MENA mène un travail fondamental de plaidoyer et de sensibilisation pour contrer ces effets.

Quels mécanismes nourrissent la non abordabilité ou l’indisponibilité des médicaments ?

Les médicaments sont des biens marchands soumis aux lois de la propriété intellectuelle comme les autres produits. Les laboratoires déposent des brevets sur les molécules, valables 20 ans en moyenne : ils sont en situation de monopole. La concurrence ne joue plus son rôle de régulation des prix, et les risques de rupture de stock s’accroissent. Pour faire face à ces situations et sensibiliser les parties prenantes sur l’impact de la propriété intellectuelle sur l’accès aux médicaments, la veille et le plaidoyer doivent être au cœur de la riposte de la société civile.

Quel rôle peut jouer la société civile ?

Elle peut lever les barrières de la propriété intellectuelle, par un travail de veille sur les prix, sur la fabrication des médicaments, et de plaidoyer auprès des laboratoires ou des gouvernements. Les laboratoires peuvent choisir d’accorder des «licences volontaires» à un pays en fonction de l’urgence sanitaire ou de sa situation financière. Ces licences peuvent aussi être prises unilatéralement par les gouvernements, on parle alors de «licences obligatoires».

Quels sont les résultats concrets du plaidoyer ?

Le dolutégravir, traitement de contrôle de la charge virale du VIH, a été commercialisé dès 2014 à 14 000 dollars par an et par patient. Après négociations, son prix, abaissé à 1500 dollars au Maroc, restait prohibitif. Nous avons donc fait pression sur le ministère de la Santé et le gouvernement pour la prise d’une licence obligatoire, notamment en les invitant à rencontrer la société civile et les représentants de patients aux grands rendez vous mondiaux comme AfraVIH ou le congrès AIDS. En 2016, le laboratoire a accordé une licence volontaire au Maroc. Le traitement coûte aujourd’hui 45 dollars par patient et par an : on estime que 30 fois plus de patients y auront accès lorsqu’il sera disponible au Maroc en 2021.