ITPC-MENA et l’ALCS appellent le Maroc à émettre une Licence d’office sur le Dolutegravir
A l’occasion de la journée mondiale contre le sida, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) vient de dévoiler ses nouvelles recommandations déterminant le standard de soins au traitement de l’infection à VIH. Les nouveaux standards de l’organisation appellent les pays à démarrer le traitement tôt et ce dès le diagnostic de l’infection à VIH et l’utilisation de molécules récentes comme le dolutegravir : plus efficaces, avec peu d’effets secondaires et présentant moins de risques de développement de résistance au traitement.
« C’est une bonne nouvelle de voir l’OMS adapter ses recommandations aux dernières données scientifiques. Malheureusement, c’est la première fois que le Maroc sera incapable d’appliquer les standards de l’OMS notamment l’utilisation du Dolutegravir sans recourir à l’arsenal juridique », a déclaré Hakima Himmich, présidente de l’ALCS.
Le Dolutegravir est un agent antirétroviral utilisé en combinaison avec d’autres médicaments pour la prise en charge de l’infection à VIH. Il se caractérise par sa grande efficacité à bloquer la réplication du virus, son faible dosage avec très peu d’effets secondaires et une barrière génétique très élevée permettant d’éviter le développement de résistances au traitement. Produit par le laboratoire ViiV Healthcare (joint venture de GSK, Pfizer et Shionogi), il est commercialisé à 14.000$ par patient/an (USA) sans compter le coût des molécules associées. Un prix inaccessible pour le Maroc où une trithérapie annuelle complète coute 135$ par an. Au Maroc, le médicament est protégé par un brevet délivré par l’OMPIC et valable jusqu’en 2026 .
Selon Othman Mellouk, Chargé des questions de propriété intellectuelle et accès aux médicaments à ITPC : « Des versions génériques du dolutegravir estimées à 70$ par patient et par an seront disponibles dès 2016. Le laboratoire ViiV a accordé une licence volontaire au Medicines Patent Pool Qui a été signée depuis par dix génériqueurs Indiens au profit de 121 pays. Mais cette licence exclut toute possibilité d’export vers le Maroc où le médicament est protégé par un brevet jusqu’en 2026 . Selon le Medicines Patent Pool, l’article 2.4 de la licence permet de fournir les pays hors territoire comme le Maroc mais seulement en cas d’utilisation de licence d’office ».
Les associations demandent au ministère de la Santé de recourir à l’article 67 de la loi Marocaine la propriété intellectuelle et industrielle qui permet d’émettre une licence d’office pour lever le brevet N°MA30388 sur le Dolutegravir et ce afin de protéger la santé publique et l’intérêt général. Cette mesure est tout à fait conforme aux différents accords internationaux (OMC) et bilatéraux (ALE Maroc-USA) signés par le Maroc ; et est fréquemment utilisée dans le domaine du médicament par plusieurs pays du monde y compris l’Europe les Etats Unis d’Amérique.
« Il est juste inimaginable que les personnes séropositives au Maroc attendent 2026 pour accéder à un médicament efficace et désormais essentiel selon l’OMS au moment où la majorité des pays Africains vont commencer à l’utiliser dès l’année prochaine. C’est d’autant plus important que l’initiation précoce du traitement va poser des défis en matière d’observance et d’apparition de résistance qui ne pourront être résolus que par le recours à des molécules nouvelles comme le dolutegravir », conclut Hakima Himmich.