Création d’un collectif pour la préservation du droit à la santé au Maroc
Une dizaine d’organisations marocaines de santé et de droits humains ont décidé de se regrouper au sein d’un collectif en vue de préserver le droit à la santé des Marocains dans le cadre de l’approche des reprises des négociations de l’Accord de libre-échange complet et approfondi (ALECA) entre le Maroc et l’Union européenne.
« A l’heure où le Royaume du Maroc et l’UE s’apprêtent à reprendre les négociations sur l’accord de libre-échange complet et approfondi (ALECA), la société civile marocaine s’unit pour tirer la sonnette d’alarme sur le danger que représente l’ALECA pour l’accès aux génériques dans notre pays ». C’est ce que souligne une note d’information des signataires rendue publique récemment et dans laquelle ces derniers réclament un débat national sur le système de protection de la propriété intellectuelle et l’accès aux médicaments ; une révision de la législation nationale en matière de protection de la propriété intellectuelle et la suppression de toutes les clauses qui vont au-delà des exigences de l’OMC ainsi que le retrait de toutes dispositions relatives à la propriété intellectuelle et industrielle dans l’accord en cours de négociation qui dépassent ce qui est requis dans le cadre des accords ADPIC.
En effet, à l’heure où le ministère de la Santé affirme vouloir mener une politique d’accès aux médicaments basée sur les génériques, et que la Constitution marocaine proclame, en son article 31, que l’Etat œuvre à la mobilisation de tous les moyens pour faciliter l’accès aux soins de santé, les signataires lui demandent officiellement d’ouvrir une consultation avec la société civile et les experts pour garantir au mieux la prise en compte des intérêts des Marocains.
Dans cette note, les signataires rappellent que l’Union européenne et le Royaume du Maroc entameront en 2016 le 5ème round de négociations sur l’ALECA après finalisation par le Maroc d’une étude d’impact sur les secteurs couverts. Laquelle étude « n’a pas associé ni été partagée avec les acteurs associatifs notamment ceux engagés dans l’accès à la santé et aux médicaments et ne traite pas des conséquences de cet accord sur la santé publique et l’accès aux médicaments », déplorent les signataires rappelant que « la société civile demande depuis le début des négociations, en 2013, des processus transparents et une consultation avec la société civile ».
Sachant que les exigences de l’UE dans le cadre de l’ALECA comportent des clauses qui demandent une protection abusive des médicaments par le système de propriété intellectuelle, au-delà des standards internationaux, les organisations marocaines sont persuadées que cela « va entraver l’accès aux génériques au Maroc, au détriment de la santé des patients marocains ».
En effet, poursuivent-ils, plusieurs dispositions de l’ALECA outrepassent les normes internationales prévues par l’Accord sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au Commerce (ADPIC). Lesquels « permettent à tous les pays d’user de flexibilités pour protéger les intérêts de santé publique et notamment en se procurant des versions génériques de médicaments ».
Pour les signataires, « l’ALECA est donc un accord à deux vitesses qui visera à protéger les investissements européens et servir les intérêts des grandes multinationales pharmaceutiques, tandis qu’en matière de santé, le Maroc a tout intérêt à protéger les mécanismes autorisés par les règles du commerce international pour garantir aux patients marocains, des médicaments à prix abordables ». D’autant plus que « notre économie est incapable d’assumer les coûts des médicaments de marque aux prix fixés par les grands laboratoires européens et américains, particulièrement dans des domaines pour lesquels les traitements sont aussi coûteux que le VIH/sida, l’hépatite C, le cancer ou d’autres maladies chroniques ».
Le Collectif pour la préservation du droit à la santé des Marocains regroupe en son sein dix organisations. A savoir : Adala Justice, ALCS, AMDH, ATTAC, Collectif Droit à la santé, Confédération démocratique du travail, Fédération nationale des associations amazighes, Forum des Alternatives Maroc, ITPC MENA et Réseau Euromed Maroc des ONG.