Communiqué de presse conjoint AMDH et ITPC MENA
Marrakech, le 15 mars 2023
Le 02 mars 2023, la Cour des comptes du Royaume du Maroc a publié un document regroupant les
thématiques les plus importantes contenues dans son rapport annuel au titre de l’année 2021.
Le volet consacré à la politique pharmaceutique nationale et au système de médicaments présente une série de constats qui viennent conforter les craintes de la société civile depuis maintenant plusieurs années.
L’Association Marocaine des Droits de l’Homme (AMDH) et l’association pour l’accès au traitement (ITPC MENA), tiennent à rappeler qu’en l’absence de réformes législatives et juridiques du secteur de la santé et du médicament, la souveraineté sanitaire et médicamenteuse du pays ne sera pas atteinte.
Parmi les principaux constats formulés par la Cour des comptes :
Concernant le cadre juridique :
- Le cadre juridique actuel est peu incitatif à la production nationale de manière globale et à la pénétration des médicaments génériques en particulier et, par conséquent, à la disponibilité des médicaments et à leur accessibilité économique.
- Un cadre juridique qui encourage les importations au détriment de la production locale.
- La durée des brevets des médicaments princeps au Maroc (entre 20 et 25 ans, selon la loi sur la propriété industrielle), relativement longue par rapport à d’autres pays.
Concernant le prix des médicaments :
- L’équilibre du système de couverture maladie et sa généralisation à toute la population marocaine sont conditionnes par une révision à la baisse du prix des médicaments ainsi que par une rationalisation de leur prescription.
- Les baisses peu significatives des prix sont le résultat de l’adoption d’une méthode de révision des prix des princeps basée sur la moyenne des “prix fabricant hors taxe” (PFHT) dans 6 pays du Benchmark (Arabie Saoudite, Belgique, Espagne, France, Turquie, Portugal)
Concernant les délais pour l’obtention des autorisations de mise sur le marché (AMM) et la Fixation des prix
- Les délais règlementaires s’avèrent longs, ce qui ne favorise pas la disponibilité des médicaments.
- Même constat pour ce qui est de l’examen des données concernant la fixation des prix
- Malgré les améliorations constatées, les processus actuels d’autorisation, de contrôle, de fixation et de révision des prix des médicaments ne permettent pas encore de rassurer pleinement sur la disponibilité et la qualité des médicaments, ni leur accessibilité économique.
Parmi les principales Recommandations de la Cour des comptes :
- La mise en place par le MSPS d’une Politique Pharmaceutique Nationale axée sur le développement de la production nationale,
- Revoir les processus d’autorisation, de contrôle et de fixation des prix des médicaments, les délais règlementaires d’octroi des AMM, les méthodes de fixation et de révision des prix, de manière à garantir leur disponibilité et accessibilité économique continues.
En complément de recommandations de la Cour de comptes, l’AMDH et ITPC MENA appellent par ailleurs à la révision profonde des lois régissant la propriété intellectuelle et le secteur du médicament.
» Pour ce qui est des médicaments à la fois onéreux et vitaux, nous société civile estimons que la mesure la plus urgente est l’utilisation des licences obligatoires et d’offices pour les médicaments qui sont encore protégés par un Brevet. C’est une procédure légale, conforme aux recommandations de l’OMS et de l’OMC et qui ne contredit pas les accords de libre échange signés par le Maroc, » rappel Aziz Rhali, Président de l’AMDH, en ajoutant que la société civile revendique :
- La simplification de la procédure d’octroi des « licences d’office » en donnant plus de pouvoir au ministère de la Santé (Art. 67)
- L’élargissement des motifs d’octroi des « licences obligatoires » aujourd’hui trop restrictifs par rapport à l’ADPIC et donner plus de pouvoir au ministère de la Santé (Art. 60-63)
Ces amendements ont pour but de promouvoir l’usage des médicaments multi-sources (génériques) de qualité assurée, afin de maximiser le rapport coût-efficacité des dépenses médicales de l’État et de l’individu, et promouvoir l’industrie pharmaceutique nationale.
“La crise du COVID-19 a clairement révélé le manque de préparation de notre arsenal législatif pour répondre aux épidémies et crises sanitaires et relever les défis sur lesquels notre pays est engagé pour concrétiser le droit à la santé pour tous”, a déclaré Othoman Mellouk, Co-fondateur d’ITPC MENA et responsable du programme d’accès au traitement et propriété intellectuelle à ITPC Global.
Le Maroc à lancé des chantiers très ambitieux pour la réforme de son système de santé. Toutefois, pour que les objectifs du Royaume en matière de santé soient atteints, il est important de ne pas négliger les recommandations formulées par les autorités compétentes ainsi que la société civile. Seule, une concertation étroite entre les différents acteurs clé garantira la réussite de ces initiatives, permettant ainsi de préserver et renforcer la souveraineté sanitaire du pays.
**Principaux axes du rapport annuel de la Cour des comptes (2021) Page 52 à 54: http://bit.ly/3lfBwqd
Pour plus d’informations, merci de contacter :
Aziz Rhali, Président de l’AMDH Email : rhaliaziz@gmail.com | Othmane Marrakchi, Chargé de plaidoyer ITPC MENA Email : othmane.marrakchi@itpcmena.org |